Restitution des terres, archives… Les actions concrètes après les excuses
Marine Henriot, Christopher Wells – Envoyés spéciaux à Edmonton, Canada
En 1990, Phil Fontaine est l’un des premiers à parler publiquement des violences physiques, psychologiques et sexuelles qu’il a subies lorsqu’il était élève des pensionnats. Lui a passé 7 ans au pensionnat de Fort Alexander, tenu par les Oblats de Marie Immaculée à Sagkeeng dans la province de Manitoba.
Cette figure d’autorité parmi les autochtones du Canada faisait partie de la délégation venue au printemps au Vatican, et lundi 25 juillet il était parmi les survivants à Mascwacis dans l’Alberta pour entendre la demande de pardon du Pape François pour le comportement de certains membres de l’Église envers les populations autochtones.
«Ce n'est pas tous les jours que nous avons l'une des personnalités publiques les plus puissantes du monde qui vient devant une communauté d'anciens survivants des pensionnats», commente Phil Fontaine, qui a également joué un rôle actif dans les excuses du Premier ministre canadien Stephen Harper en 2008, «J'ai pensé personnellement qu'il fallait beaucoup de courage, d'humilité, et que c'était un moment spécial.»
Pour le responsable autochtone, et son passé d'ancien élève d'une école résidentielle, cette visite du Pape a déjà été «capitale».
Une décision personnelle
Phil Fontaine souligne qu'il appartient à chaque personne touchée par son expérience dans le système des pensionnats de décider comment recevoir les excuses du Pape, mais il met également en évidence le pouvoir du pardon comme chemin vers une véritable guérison. «Maintenant cela dépend de chaque personne de dire si elle accepte ou non les excuses du Pape, mais je pense qu’il est important de garder en tête, que la guérison et la réconciliation peuvent être atteintes grâce au pardon.» explique Phil Fontaine, avant de continuer: «là nous avons eu le Saint-Père devant nous, qui a demandé pardon. Donc nous devons être mentalement prêts à pardonner. Pour certains c’est une étape très difficile, d’autres en revanche sont prêts depuis des années.»
Après les excuses, des actes sont attendus, commente le chef autochtone, pensant notamment aux tombes non identifiées disséminées près des pensionnats partout dans le pays. Un autre sujet auquel s’atteler est celui des archives, «nous avons eu un chercheur de l’université de Manitoba qui a passé de temps au Vatican, chez les Oblats, et là-bas il a trouvé des centaines et des centaines de photos des étudiants des pensionnats. C’est un exemple des pas concrets que l'on peut faire ensemble. Nous n’aurions pas été capables de faire ce travail de recherche si les Oblats avaient dit non.»
Reste également le problème de la restitution des terres aux communautés autochtones: «beaucoup des écoles furent construites sur nos terres, maintenant il faut qu’on agisse pour que le gouvernement canadien et l’Église nous rendent nos terres, ce sont des terres qui nous appartiennent».
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