Après deux mois de manifestations, le régime iranien dans l'impasse
Entretien réalisé par Olivier Bonnel - Cité du Vatican
Cela fait deux mois désormais que l’Iran est secouée par des manifestations délenchées par la mort de Mahsa Amini, cette jeune fille kurde arrêtée par la police des mœurs pour avoir mal porté son voile.
Depuis la république des mollahs s’est embrasée et la contestation est de plus en plus diffuse. Une colère qui s'est d'abord cristallisée dans le nord-est kurde du pays ou le Balouchistan, au sud-est, des régions traditionnellement marginalisées par le pouvoir centrale iranien, mais qui a fait ensuite tâche d'huile. De Téhéran à Maccahd en passant par Ispahan ou la ville sainte de Qom, la constestation n'a épargné aucune région de la République islamique.
Les images de jeunes Iraniennes quittant leur voile ou se coupant les cheveux ont fait le tour du monde, vite relayées sur les réseaux sociaux. Une colère qui a pris une dimension internationale avec de nombreux cortèges dans les pays étrangers.
Cette aspiration à la liberté est fortement réprimée. Au moins 326 personnes ont été tuées par les forces de sécurité, selon l'ONG Iran Human Rights (IHR), basée à Oslo. Un bilan qui pourrait être beaucoup plus lourd dans les faits.
Isolement international
Au-delà de la question de la place des femmes, c’est le cœur du système politique iranien, issu de la révolution islamique de 1979 qui est aujourd’hui remis en cause par de nombreux Iraniens. De nombreux jeunes manifestants, qui n'ont pas connu l'avènement de l'ayatollah Khomeini, font part de leur ras-le-bol d'un système verrouillé par les Gardiens de la Révolution. Le tout dans un pays marqué par une détérioration croissante des conditions économiques et sociales, accuentuée par les sanctions internationales visant Téhéran.
Depuis deux mois, le régime iranien semble d'ailleurs plus isolé que jamais. Les pays occidentaux ont accru leurs sanctions. Le 14 novembre, l'Union européenne a par exemple sanctionné 29 responsables iraniens, dont le ministre de l'Intérieur Ahmad Vahidi, et trois institutions, notamment la chaîne publique Press TV, accusée d'avoir diffusé "les aveux forcés" de détenus après la répression des manifestations. Téhéran a promis de répondre à ces sanctions "avec force".
Quelle est la nouveauté de ce mouvement par rapport aux épisodes de révolte connus dans le passé? Quelles sont les marges réelles de manœuvre d'un pouvoir iranien qui semble à bout de souffle? Éléments de réponse avec Bernard Hourcade, directeur de recherche émérite au CNRS et spécialiste de l’Iran.
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