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À leur tour, les États-Unis testent l’externalisation des demandes d’asile

En mai dernier, les États-Unis mettaient fin au «Titre 42», une mesure liée à la pandémie de Covid-19 et qui permettait légalement de bloquer les migrants à la frontière mexicaine. Pour éviter un afflux de personnes à sa frontière sud, Washington procède depuis la mi-juin à une phase pilote de six mois d’externalisation de la gestion des demandes d’asiles.

Entretien réalisé par Marine Henriot – Cité du Vatican

Après l’Union européenne via la Turquie et la Grande-Bretagne via le Rwanda, les Etats-Unis mettent eux aussi en place leur système d’externalisation de la gestion des demandeurs d’asile.  Depuis la mi-juin et pour une phase pilote de six mois, des centres de gestion de migrants ouvrent leur porte en Colombie et au Guatemala. D’autres centres pourraient également ouvrir par la suite au Costa Rica et en Équateur.

Le but de Washington: officiellement faciliter le parcours des demandeurs d’asile et des migrants et éviter un attroupement des personnes sans-papiers à sa frontière avec le Mexique. Ces centres sont gérés par l’OIM, l’Organisation Internationale pour les Migrations, et le Haut-commissariat des Nations unies pour les réfugiés, deux organisations des Nations unies.

L’année dernière, plus d’un million de personnes ont traversé l’Amérique latine pour se rendre vers les États-Unis, un chiffre en hausse après 5 années de recul.

Qu’est-ce que cela peut changer pour les demandeurs d’asile?

La personne qui veut rejoindre les Etats-Unis devra donc désormais obligatoirement prendre rendez-vous dans ces centres, suivra ensuite un entretien avec le personnel des Nations unies puis une décision des autorités américaines quant à une éventuelle autorisation de visa ou d’asile, explique Lucie Laplace, doctorante en sciences politiques à l’université Lumière Lyon II en France et au laboratoire Triangle, et fellow à l’institut Convergences migrations. Ces centres pourraient également gérer des demandes pour l’Espagne ou les États-Unis. En revanche, pour prendre un rendez-vous, il faut nécessairement un téléphone portable et des documents d’identités valides, explique la spécialiste des migrations en Amérique latine, regrettant une politique qui ne fait pas la part belle aux droits de l’Homme. Par ailleurs, aucune solution ne semble prévue pour le logement des personnes attendant une réponse des autorités.

Washington espère gérer entre 5 000 et 6 000 demandes par mois et ainsi éviter la pression à sa frontière. En effet, si un demandeur d’asile ou un migrant se rend à la frontière états-unienne sans passer par ces centres, il sera automatiquement refoulé dans son pays ou à la frontière côté Mexique.

L’inutilité du mur?

En 2006, les États-Unis de George W. Bush actaient de la construction d’une barrière pour fermer sa frontière avec le Mexique. Aujourd’hui, le mur s’étend sur 1 300 km, les travaux sont toujours en cours et la nouvelle clôture devrait atteindre à terme 3 140 km.

«C’est un consensus scientifique, un mur n’est pas une solution, il y a toujours des personnes qui vont passer parce qu’on ne peut pas maîtriser à 100% une frontière», rappelle Lucie Laplace. Si ces centres en Amérique Latine peuvent être une alternative, «cela ne supprime pas les envies de de migrer et notamment quand il y a des causes de violence politique ou comme en Amérique centrale des causes de réchauffement climatique, ce sont des phénomènes de fond qui vont se poursuivre», «Tant que ces problèmes de fond ne seront pas solutionnés, les personnes souhaiteront migrer».

Entretien avec Lucie Laplace

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24 juin 2023, 09:52