COP28: La lutte pour leur survie des peuples autochtones
Marine Henriot – Envoyée spéciale à Dubaï, Emirats arabes unis
Une ligne de crayon sur le visage, des habits traditionnels et un air déterminé, Keury Rodriguez est Taino, un peuple autochtone des Caraibes. Elle explique avoir fait le déplacement à la COP28 de Dubai pour assurer sa survie: «Mon peuple est proche de l’extinction. Presque éteint. En venant ici, je représente des milliers d’ancêtres, des milliers de peuples autochtones qui n’ont pas survécu. Notre seule présence fait bouger les choses».
A ses cotés, Gloria, qui vient de la région de Pastaza dans l’est de l’Équateur, province entièrement recouverte par la forêt amazonienne et qui abrite aujourd’hui une communauté descendante des Taino. «Il pleut tous les jours et la rivière grossit, mais il n’y a plus rien à pécher ni à chasser, donc maintenant, il n’y a plus de marché pour acheter de la nourriture» regrette-t-elle.
Aujourd'hui présents dans les Caraïbes et en Amérique du Sud, les Taino occupaient déjà une partie des terres avant l’arrivée des européens au XVe siècle. Ils sont désormais en première ligne face aux changements climatiques, qui bouleversent leurs modes de vie basés sur le respect et l’utilisation saine des ressources de la nature.
Pourtant, sur le site immense de la COP de Dubaï, ils peinent à se faire entendre, explique Keury Rodriguez. «Je ne me sens pas du tout écoutée. Déjà, cela a été difficile d’être accréditée pour venir ici, et tout à l’heure, la sécurité a confisqué nos instruments. On ne nous laisse pas jouer de nos tambours qui pour nous sont une thérapie, on ne veut pas que l’on soit ici car nous, les peuples indigènes, sommes des médicaments pour la terre» estime la jeune activiste.
«Besoin des personnes blanches pour porter notre message»
Les Taino ont été déclarés éteints au XVIe siècle. Aujourd’hui, il n’existe pas de chiffres officiels sur leur nombre. Sur les bancs de la COP28, ils sont représentés sous la bannière de l’UCPT, la Confédération unie du peuple Taino, basée à Porto Rico.
«Nous avons besoin des personnes blanches pour porter notre message», souligne Keury Rodriguez, encore secouée par son altercation avec les forces de sécurité, mais convaincue de son combat, «Je sens que j’ai un rôle particulier à jouer en tant que femme, en tant que femme autochtone, et en tant que descendante africaine.»
Difficultés accentuées pour les femmes
Les femmes qui par ailleurs sont encore plus touchées que les hommes par les conséquences des changements climatiques, explique-t-elle: «Par exemple nos femmes doivent marcher jusqu'aux rivières pour puiser l’eau, et juste car ce sont des femmes, peut-être qu’elles ne reviendront pas, car elles sont exposées aux risques de féminicides. Elles sont aussi directement touchées par la sécheresse, car à cause du manque d’eau elles n’ont pas accés aux produits d'hygiène de base, notamment pendant leurs menstruations. A cause du manque d’eau, elles n’ont pas non plus la possibilité d’accoucher en toute sécurité».
Venues de l'autre bout de la planéte, ces deux femmes autochtones attendent un texte final de la COP28 ambitieux et qui prévoit la sortie des énergies fossiles.
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