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Vue du camp prévu pour les réfugiés à Gjader en Albanie, le 4 juin 2024. Vue du camp prévu pour les réfugiés à Gjader en Albanie, le 4 juin 2024.  

Accord Italie-Albanie sur les migrants: le HCR veillera au respect du droit d'asile

Le Haut-Commissariat des Nations unies pour les Réfugiés et la société civile expriment leur inquiétude quant au respect du droit international dans les centres mis en place en Albanie. Ils seront opérationnels à la fin du mois d'août selon le gouvernement italien.

Stefano Leszczynski - Cité du Vatican

Les murs de la forteresse Europe sont de plus en plus hauts et infranchissables pour tous ceux qui fuient la guerre, la persécution, la violence, le changement climatique ou la simple misère. C'est ce que confirment les données de Frontex, l'Agence européenne pour le contrôle des frontières extérieures, qui font état d'une baisse de 32% du nombre de personnes tentant de franchir les frontières de manière irrégulière. Les flux le long des tristement célèbres routes des Balkans occidentaux (-75%) et de la Méditerranée centrale (-64%) ont chuté de manière spectaculaire. Dans une interview accordée aux médias du Vatican, Gianfranco Schiavone, de l'Asgi, l'Association italienne pour les études juridiques sur l'immigration, souligne que, face à une situation de crise internationale inchangée, «ces données indiquent simplement que les itinéraires suivis par les migrants en quête de protection ont changé et que nombre d'entre eux se sont retrouvés bloqués dans des pays tiers où ils ne peuvent bénéficier d'aucune protection ou assistance, comme c'est le cas en Libye ou en Tunisie, par exemple».

 

L'externalisation des frontières

L'attitude fermée de l'Europe et de ses États frontaliers, soulignent les organisations de la société civile, vise à orienter de plus en plus d'énergies politiques et financières vers ce que l'on appelle «l'externalisation des frontières». Ce sont les États limitrophes des frontières européennes qui décident de bloquer ou d'accueillir les migrants en transit. La solution identifiée dans le pacte Italie-Albanie, avec la création de deux centres d'accueil et de détention à Shengjin et Gjadër, est en ce sens une nouveauté. L'accord bilatéral prévoit en effet que les migrants secourus en mer par les unités navales italiennes soient transférés de force sur le territoire albanais, sauf en cas de fragilité particulière. Là, les migrants seront identifiés et leur aptitude à accéder aux formes de protection internationale prévues par l'Italie, y compris l'asile, sera évaluée. Toutefois, souligne Gianfranco Schiavone de l'Asgi, le fait que les demandes d'asile soient examinées dans un pays tiers, dans des installations fermées, où les migrants seront en fait détenus et isolés, suscite une grande perplexité juridique quant à d'éventuelles contradictions avec le droit européen lui-même.

Le HCR assurera un suivi pendant trois mois

Les préoccupations juridiques concernant le respect des normes internationales en matière d'asile sont également partagées par le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), qui a annoncé qu'il s'engageait à contrôler la mise en œuvre de l'accord entre l'Italie et l'Albanie pendant au moins trois mois. L'objectif est d'informer correctement les migrants sur la possibilité d'accéder aux procédures de protection internationale. D'un point de vue juridique, souligne encore Gianfranco Schiavone, le problème est celui du respect des normes garanties par le droit international aux demandeurs de protection internationale: le droit d'être informé, le droit d'avoir librement accès à des avocats, le droit de contacter des associations indépendantes, le droit de bénéficier d'une assistance adéquate, le droit de voir sa demande examinée, éventuellement lors d'une audience en personne et non en ligne.

Questions non résolues

Le sort des migrants qui se verront refuser l'asile par la partie italienne n'est pas non plus résolu. Seront-ils rapatriés? Et par qui? «Ce n'est pas une hypothèse d'école», poursuit Gianfranco Schiavone, «notamment parce que, selon les données publiées par le ministère italien de l'Intérieur, les refus de demandes d'asile ont fortement augmenté au cours des sept derniers mois». Traduit en chiffres absolus, cela signifie qu'au cours des sept premiers mois de 2024, plus de 32 000 personnes se sont vu refuser toute forme de protection par les commissions territoriales. Les centres en Albanie étaient censés commencer à fonctionner le 1er août, mais en raison de retards techniques dans les travaux d'installation, le ministère italien de l’Intérieur a indiqué que leur entrée en service a été reportée à la fin du mois. Le coût estimé de la mise en place et du fonctionnement des centres sur le territoire albanais s'élève à 670 millions d'euros pour cinq ans. Une somme qui, selon de nombreuses ONG, pourrait être utilisée pour renforcer et améliorer le système d'accueil et de protection existant en Italie.

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23 août 2024, 12:17