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Sœur Oleska avec les jeunes de la paroisse gréco-catholique de Saint-Nicolas à Kharkiv, dans le nord-est du pays. Sœur Oleska avec les jeunes de la paroisse gréco-catholique de Saint-Nicolas à Kharkiv, dans le nord-est du pays. 

Ukraine: sœur Oleska témoigne de la joie simple des enfants de Kharkiv

Religieuse de la Congrégation de Saint-Joseph, sœur Oleksia Pohrsnychna résidait à Kharkiv depuis quatre ans au moment de l’invasion russe. La ville est continuellement bombardée, les établissements scolaires ferment, et l’attention de la religieuse se tourne progressivement vers les plus jeunes, qu’elle tente de faire grandir, malgré la guerre.

Svitlana Dukhovych - Cité du Vatican

«Lorsque l'alerte aérienne a commencé à sonnernous étions en train de jouer avec les enfants dans la cour de la paroisse.» Sœur Oleksia Pohrsnychna de la Congrégation de Saint-Joseph a accepté de revenir pour Vatican News sur un moment de terreur partagé avec les enfants dont elle s’occupe à la cathédrale gréco-catholique Saint-Nicolas. Dimanche 15 septembre, l’armée russe a attaqué Kharkiv. Une femme âgée a perdu la vie et 42 personnes ont été blessées, parmi lesquelles quatre enfants. La zone proche de la paroisse fut par chance épargnée.


Pourquoi rester à Kharkiv?

Deuxième ville d’Ukraine, Kharkiv qui comptait près de 1,5 million d'habitants en 2021, a subi des bombardements constants depuis le premier jour de l'invasion russe. Au début du conflit, beaucoup l’ont quittée pour y revenir lorsque la ligne de front s'est éloignée. C'est en outre dans cette ville située au nord-est du pays que s'installent les familles fuyant les petites villes et les villages récemment visés par l'armée russe. C'est pourquoi de nombreuses familles avec enfants restent encore à Kharkiv, un choix dicté par le manque de ressources qui rend le déménagement impossible, ou par le fait qu'un membre de la famille se bat à proximité, ou encore parce qu'on ne veut pas abandonner des parents handicapés ou âgés.

Travailler avec les enfants

Pour ces familles, «un des grands problèmes est que, malheureusement, aujourd'hui, dans la région de Kharkiv, il n'y a pratiquement plus d'écoles, de jardins d'enfants ou d'universités ouverts et que l'enseignement se fait en ligne», explique sœur Oleksiya, présente à Kharkiv depuis 2018. Avec sœur Daria Panastblessée alors qu'elle apportait de l'aide humanitaire dans un pays voisin, elles tentent de réconforter et d’accompagner les enfants et adolescents de la paroisse gréco-catholique de Saint-Nicolas. «Ces jeunes manquent d'espace pour communiquer et socialiser. Quelques classes ont été ouvertes dans le métro, mais très peu d'enfants ont la possibilité de les fréquenter. C'est pourquoi nous essayons d'impliquer les plus petits dans certaines activités de notre paroisse. Les parents eux-mêmes, depuis le début de la guerre, nous ont demandé à plusieurs reprises d'organiser des activités et des cycles de catéchèses pour leurs enfants, même si je n'appellerais pas cela ainsi, car avec eux, il faut tout recommencer. J'appelle les parents de ces enfants des “chercheurs de Dieu“, ce sont des gens qui allaient peut-être rarement à l'église, ou qui n'y allaient jamais».

Les enfants présentent leurs dessins de la croix réalisés lors de la catéchèse du dimanche 15 septembre, avant l'attaque.
Les enfants présentent leurs dessins de la croix réalisés lors de la catéchèse du dimanche 15 septembre, avant l'attaque.

L'explosion du 15 septembre

Les enfants et les jeunes viennent à la paroisse deux fois par semaine, le mercredi et le dimanche. Sœur Oleksia, qui s'occupe des plus jeunes avec le groupe, raconte que ce dimanche 15 septembre, elle leur a expliqué la fête de la Croix glorieuse, puis leur a fait regarder un dessin animé consacré à ce thème. Ensuite, ils sont allés ensemble dans l'église pour voir la croix, et ils ont aussi dessiné une croix sur une feuille de papier. «Ils sont toujours très heureux de faire ces petits travaux, poursuit la religieuse, notamment parce qu'ils peuvent ensuite les montrer à leurs parents». Une petite fille assure envoyer tout ce qu’elle fait à son père qui est au front. Quand il fait beau, les sœurs sortent avec les enfants pour des activités en plein air. C’était le cas le jour de l’attaque «Nous étions en train de jouer avec eux dans la cour de la paroisse quand l'alerte anti-aérienne a commencé à sonner. Au bout de quelques minutes, le bruit de l'explosion s'est fait entendre à environ un kilomètre de là et nous avons immédiatement emmené les petits au sous-sol de l'église, où se trouve également une chapelleLà, nous avons commencé à chanter avec eux, pour les distraire un peu parce qu'ils avaient peur. Ensuite, nous leur avons distribué les friandises qui étaient arrivées avec l'aide humanitaire de Rome».

Les enfants goûtant aux biscuits et bonbons envoyés de Rome.
Les enfants goûtant aux biscuits et bonbons envoyés de Rome.

L'aide du Pape

L'aide mentionnée par sœur Oleksia est arrivée à l'Exarchat gréco-catholique de Kharkiv le 12 août dernier. Des camions chargés de nourriture, de vêtements, de produits d'hygiène et de médicaments, collectés avec le dicastère pour le Service de la charité, sont partis de la paroisse gréco-catholique ukrainienne de Sainte-Sophie à Rome. «Je voudrais exprimer ma gratitude à toutes les personnes qui n'oublient pas l'Ukraine et qui n'oublient pas notre Kharkiv qui résiste», a déclaré sœur Pohranychna, émue. Elle remercie en particulier le Saint-Père, le cardinal Konrad Krajewski, qui a personnellement visité la ville il y a deux ans et les diocèses de nombreuses régions d’Italie qui restent attentifs à leurs besoins.

Le Pape a veillé à ce que les jeunes du groupe de catéchèse reçoivent des thermomètres médicaux.
Le Pape a veillé à ce que les jeunes du groupe de catéchèse reçoivent des thermomètres médicaux.

Une espérance toujours vive

La religieuse explique que l'aide humanitaire reçue est distribuée à la fois aux habitants de la ville et aux nombreuses personnes déplacées qui ont dû fuir les lieux lourdement bombardés par l'armée russe ces derniers mois. «Les enfants sont très heureux lorsqu'ils reçoivent des friandises et des jouets. Ils nous demandent souvent: «Y a-t-il des cadeaux qui arrivent aujourd'hui?» C'est une petite fête pour eux, raconte sœur Pohranychna. Une fois, alors que j'expliquais quelque chose aux enfants, l'un d'entre eux m'a demandé combien de temps j’allais encore parler. Je lui ai demandé ce dont il avait besoin et il m'a répondu: “Tu sais, j'ai déjà un peu faim“. Ces épisodes font rire, mais les enfants sont simples et ouverts. C'est pourquoi je tiens à remercier tout le monde pour le soutien matériel et spirituel. Je sais que beaucoup prient pour nous afin que nous puissions supporter, surmonter cette période sombre. Nous gardons espoir. Nous parviendrons à mettre fin à cette guerre».

Distribution d'aide humanitaire dans la cour de la paroisse gréco-catholique de Saint-Nicolas à Kharkiv.
Distribution d'aide humanitaire dans la cour de la paroisse gréco-catholique de Saint-Nicolas à Kharkiv.

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23 septembre 2024, 12:46