La contrainte, préalable nécessaire pour parvenir à une sortie de crise au Soudan
Fabrice Bagendekere, SJ – Cité du Vatican
Cela fera bientôt deux ans que crépitent les balles au Soudan. La guerre qui a éclaté le 15 avril 2023 entre les paramilitaires des Forces de soutien rapide (FSR), dirigées par le général Mohamed Hamdane Daglo, et l'armée conduite par le général Abdel Fattah al-Burhane, dirigeant de facto du pays, n’a pas cessé de faire des ravages. Au contraire, les combats s’intensifient de plus en plus. Face à cette situation, la question se pose de savoir de qui la dissidence paramilitaire recevrait du soutien pour pouvoir tenir aussi longtemps à la pression de l’armée régulière. Le gouvernement soudanais semble pointer du doigt cinq pays, dont quatre de ses voisins, le Tchad, le Soudan du Sud, l'Ethiopie et l'Ouganda; et un pays du golfe, les Émirats arabes unis.
Des soupçons d'une implication du Tchad
Dans un point presse, le ministre soudanais de la Justice a affirmé avoir déposé une plainte auprès de l'Union africaine (UA) contre le Tchad, avec des preuves à l’appui, accusant son voisin occidental de fournir des armes et des munitions aux paramilitaires des FSR. «C'est une guerre d'agression de dimension régionale (…) les noms des pays sont connus et leur implication est connue quant à l'armement, le financement, le transport et la facilitation du passage d'armes à travers leurs territoires respectifs vers la milice rebelle des FSR», a déploré Maulana Muawiyah Osman. Il a déclaré avoir déposé des preuves vidéo et photos auprès de l’Union africaine, démontrant que le Tchad, principalement, fournissait des armes aux FSR, notamment dans la province du Darfour. Le Tchad avait déjà par le passé décliné toute responsabilité dans cette guerre, affirmant n’avoir aucun intérêt dans ce conflit qui, par ailleurs, aurait des répercussions sur son territoire, notamment par le flux migratoire.
Une double action
Au cours d'une conférence de presse tenue ce mercredi 6 novembre, l'ambassadeur du Soudan à Paris a, de son côté, lancé «un appel ardent» à mettre fin à la guerre dans son pays, exhortant la communauté internationale à faire pression sur les pays qui arment les Forces de soutien rapide, alimentant le conflit. C'est «une guerre dévastatrice contre l'État et le peuple soudanais», a déclaré Khalid Mohammed Farah, rappelant que «des dizaines de milliers» de personnes étaient déjà mortes, tandis que plus ou moins «deux millions» d'autres se sont refugiés à l'étranger, et «12 millions à l'intérieur du pays». Il a aussi souligné que le gouvernement soudanais continuait à compter sur l'initiative conjointe saoudo-américaine de Djeddah, lancée en mai 2023, pour une résolution pacifique de ce conflit. L’État soudanais demande ainsi aux FSR de se conformer aux «engagements préalables signés en vertu de cet accord».
Contraindre les FSR à respecter ses engagements
Malgré les accords signés entre l’armée et les forces paramilitaires, les exactions n’ont pas cessé de se multiplier. Une attaque menée par les dissidents le 26 octobre dernier a couté la vie à au moins 50 personnes dans le centre du Soudan, selon un groupe local prodémocratie. Devant ce non-respect de la parole donnée, Khalid Mohammed Farah estime que la contrainte est le seul moyen restant pour amener les FSR à respecter leurs engagements. Il a aussi indiqué que le Soudan avait «approché la France» pour une médiation entre le Soudan et le Tchad. Notons qu’à l’heure actuelle, les combats se sont intensifiés dans l'Etat d'Al-Jazira, contrôlé par les FSR depuis la fin de l'année dernière.
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