Le Pape aux autorités irakiennes: «Que l’on donne la parole aux artisans de paix»
Vatican News
Dès son atterrissage et comme le veut la tradition, le Pape a rencontré les responsables politiques irakiens: le Premier ministre à l’aéroport, puis le président à 21km de là, au sein du Palais présidentiel, au cœur de la zone verte à Bagdad, une zone internationale et très sécurisée où se trouve les ambassades étrangères.
Dans le grand salon du palais où siègent les autorités irakiennes depuis 2009, le Pape s’est adressé aux autorités, aux membres de la société civile et du corps diplomatique, soit quelque 150 personnes, se réjouissant de l’opportunité de cette visite apostolique «longtemps attendue et désirée» dans une terre qui est le «berceau de la civilisation, étroitement liée, à travers le Patriarche Abraham et de nombreux prophètes, à l’histoire du salut et aux grandes traditions religieuses du judaïsme, du christianisme et de l’islam». Si le Pape vient en pèlerin pour encourager l’Église locale dans son témoignage de foi, d’espérance et de charité, il souhaite aussi promouvoir la fraternité avec les autres communautés et traditions religieuses, «que Dieu nous accorde de marcher ensemble».
Lien vers le texte intégral du discours
Les souffrances du peuple irakien
Le Pape connaît les difficultés et les souffrances du peuple irakien. Comme le reste du monde, le pays est touché par la pandémie mondiale de Covid-19 qui appelle «à repenser nos modes
de vie» et François défend, encore, une distribution équitable des vaccins pour tous. Mais il se penche surtout sur les plaies spécifiques de l’Irak qui a connu en quelques décennies, «les désastres des guerres, du fléau du terrorisme et des conflits sectaires souvent fondés sur un fondamentalisme qui ne peut accepter la coexistence pacifique de différents groupes ethniques et religieux, d’idées et de cultures diverses». Tout cela a apporté mort, destructions et ruines, matérielles et dans les cœurs. Il évoque le sort des Yézidis, victimes de «barbaries insensées et inhumaines» en raison de leur appartenance religieuse.
François offre un regard confiant vers l’avenir, qui passe par la reconstruction afin de laisser un monde meilleur aux prochaines générations. Il faut d’abord apprendre à se regarder, avec ses différences. Pour lui, «la diversité religieuse, culturelle et ethnique, qui a caractérisé la société irakienne pendant des millénaires, est une précieuse ressource à laquelle puiser, non pas un obstacle à éliminer». Le pays doit montrer à tous, en particulier au Moyen-Orient, souligne François, que les différences - plutôt que de donner lieu à des conflits - doivent coopérer en harmonie dans la vie civile.
Les garants d’une véritable reconstruction
La coexistence fraternelle a besoin d’un effort de chacun pour dépasser les rivalités et les oppositions, elle a besoin d’un «dialogue patient et sincère, protégé par la justice et le respect du droit», ce qui n’est pas un exercice facile, reconnaît François, et requiert de «se parler à partir de l’identité la plus profond que nous avons, celle de fils de l’unique Dieu et Créateur». Une première fois, le Pape en appellera aux autorités afin qu’elles accordent à toutes les communautés religieuses «reconnaissance, respect, droits et protection». Il salue les efforts faits en ce sens.
«Une société qui porte l’empreinte de l’unité fraternelle est une société dont les membres vivent dans la solidarité», affirme le Pape dont les pensées vont à ceux qui ont perdu des proches, leur maison, des biens de première nécessité, mais aussi à tous ceux qui «luttent chaque jour à la recherche de sécurité et de moyens pour avancer», alors que le chômage et la pauvreté augmentent. «Après une crise, il ne suffit pas de reconstruire, il faut le faire bien, de manière à ce que tous puissent mener une vie digne», a insisté François qui appelle à créer «des possibilités concrètes, que ce soit sur le plan économique ou dans le domaine de l’éducation, comme aussi pour le soin de la création, notre maison commune», avant d’interpeler directement les autorités. S’il est nécessaire «de lutter contre la plaie de la corruption, les abus de pouvoir et l’illégalité», ce n’est pas suffisant, estime le Pape qui appelle, en même temps, à «édifier la justice, faire grandir l’honnêteté, la transparence et renforcer les institutions à cet effet.» Alors la stabilité peut grandir et une saine politique peut se développer, permettant aux jeunes l’espérance d’un avenir meilleur.
À nous d’écouter Dieu et de marcher dans ses voies
En pèlerin pénitent, le Pape demande pardon au Ciel et aux frères pour les nombreuses destructions et de cruautés. En pèlerin de paix, il rappelle combien il a, comme ses prédécesseurs, prié pour la paix en Irak. «Dieu écoute toujours !», assure François qui propose à tous de se mettre maintenant à son écoute, et à marcher dans ses voies.
Afin de continuer à poser les bases d’une société démocratique, à nouveau, le Pape juge indispensable «d’assurer la participation de tous les groupes politiques, sociaux et religieux, et de garantir les droits fondamentaux de tous les citoyens», afin que «personne ne soit considéré comme citoyen de deuxième classe».
Les nations appelées à aider sans imposer
Elle aussi interpellée par le Saint-Père, la communauté internationale a un rôle à jouer dans la promotion de la paix, ce qui requiert une coopération à l’échelle mondiale pour affronter les inégalités et les tensions régionales. Le Pape salue le travail de ceux –États ou organisations et agences, dont plusieurs catholiques- qui œuvrent pour la reconstruction, l’assistance aux migrants ou la réconciliation. Il demande aux nations de ne pas retirer aux Irakiens «la main tendue de l’amitié et de l’engagement constructif», dans un esprit «de commune responsabilité avec les Autorités locales» et, souligne-t-il, «sans imposer des intérêts politiques ou idéologiques».
Les religions au service de la paix
À la fin de ce long discours, le Souverain Pontife rappelle ce qu'il a plusieurs fois martelé: «le nom de Dieu ne peut pas être utilisé pour justifier des actes d’homicide, d’exil, de terrorisme et d’oppression». Au contraire, Dieu appelle à répandre amour, bienveillance, concorde. Ainsi l’Église «désire être amie de tous et, par le dialogue, collaborer de façon constructive avec les autres religions, à la cause de la paix». Le Pape souligne le «riche héritage» de la très ancienne présence des chrétiens en Irak. Ils souhaitent pouvoir continuer à contribuer à la vie du pays, «au service de tous». «Leur participation à la vie publique, en tant que citoyens jouissant pleinement de droits, de liberté et de responsabilité, témoignera qu’un sain pluralisme religieux, ethnique et culturel peut contribuer à la prospérité et à l’harmonie du pays», assure François, qui encourage toutes les responsables présents à continuer à œuvrer pour le bien commun et édifier une société «empreinte d’unité fraternelle, de solidarité et de concorde».
Le Saint-Père invoque enfin le Tout-Puissant afin qu’Il les soutienne dans leurs responsabilités et les guide sur la voie de la sagesse, de la justice et de la vérité. Il invoque l’abondance des bénédictions divines sur tout le peuple irakien.
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