Ukraine: face à un «abus pervers de pouvoir», François appelle au dialogue
Adélaïde Patrignani – Cité du Vatican
Après une pandémie ravageuse et dont on ne voit pas la fin, la «tragédie de la guerre»: celle-ci, «qui se consume au cœur de l’Europe, nous laisse stupéfaits», écrit François dans ce message rédigé le 15 mars dernier à l’attention de Mgr Gintaras Grušas, archevêque de Vilnius et président du Conseil des conférences épiscopales européennes (CCEE), l’une des entités organisatrices de l’évènement.
L’humanité menacée par un «abus pervers de pouvoir»
«Jamais nous n’aurions pensé revoir de telles scènes, qui rappellent les grandes guerres du siècle dernier, ajoute le Souverain Pontife. L'appel à l'aide déchirant de nos frères et sœurs ukrainiens nous pousse, en tant que communauté de croyants, non seulement à réfléchir sérieusement, mais à pleurer avec eux et à faire quelque chose pour eux ; à partager l'angoisse d'un peuple dont l'identité, l'histoire et la tradition ont été blessées. Le sang et les larmes des enfants, la souffrance des femmes et des hommes qui défendent leur terre ou fuient les bombes secouent notre conscience», déclare l’évêque de Rome. «Une fois de plus, l'humanité est menacée par un abus pervers de pouvoir et d'intérêts particuliers, qui condamne des personnes sans défense à subir toutes les formes de violence brutale», reconnaît-il avec fermeté.
Rester solidaires
À cette 3e édition des Journées sociales catholiques européennes, qui se tient dans la capitale slovaque depuis le 17 mars et jusqu’à ce dimanche, sont notamment présents le cardinal Michael Czerny, préfet par intérim du dicastère pour le Service du Développement humain intégral, des membres du CCEE, de la COMECE, et de la Conférence épiscopale slovaque, ainsi que d’autres épiscopats européens. Le Saint-Père remercie chaleureusement ces évêques pour leur aide «rapide» aux réfugiés ukrainiens, dont le nombre a atteint cette semaine les 3 millions.
«Ne nous lassons pas de cela, et ne cessons pas d'invoquer la paix de Dieu et des hommes, demande François. Je vous demande donc instamment de continuer à prier pour que ceux qui détiennent le destin des nations ne négligent rien pour arrêter la guerre et ouvrir un dialogue constructif afin de mettre un terme à l'immense tragédie humanitaire qu'elle provoque», indique-t-il.
Un défi pour les pays européens
Le Saint-Père aborde ensuite un aspect politique, en s’appuyant sur sa lettre encyclique Fratelli tutti. La guerre, rappelle-t-il, est «un échec de la politique et de l'humanité, une reddition honteuse aux forces du mal» qui peut inviter à refonder «une architecture globale de paix». L’Europe, «née pour garantir la paix après les guerres mondiales», y aurait «un rôle primordial».
Puis il se penche sur les changements «sociaux, économiques, culturels et même ecclésiaux» induits par la pandémie. Ceux-ci lancent à l’Europe et aux chrétiens en particulier un défi : renouer avec l’intuition des pères fondateurs, notamment Alcide de Gasperi, qui parlait du «bien commun de nos patries européennes, de notre patrie l’Europe». Les pays qui la composent doivent donc «s’unir encore plus dans le respect de la diversité», sans s’uniformiser.
La charité, premier devoir des chrétiens
Les chrétiens sont appelés quant à eux à repartir de «Jésus et [de] son amour salvateur», en témoignant de l’Évangile. Et le Pape de se référer à saint Martin de Tours, représenté sur le logo de cet évènement ecclésial européen. «Il nous rappelle que l'amour est la proximité concrète, le partage, l'attention portée aux autres», écrit le Saint-Père. «Ceux qui aiment surmontent la peur et la méfiance envers ceux qui viennent à nos frontières en quête d'une vie meilleure : si accueillir, protéger, accompagner et intégrer tant de frères et sœurs fuyant les conflits, la famine et la pauvreté est juste et humain, c'est encore plus chrétien», souligne-t-il.
À nouveau, François plaide que pour les murs pouvant entraver le dialogue sur le territoire européen se transforment en ponts. Et cela, conclut-il, afin que «grandisse la coexistence humaine fondée sur la fraternité».
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