Les roses de sainte Elisabeth et le défi de conjuguer identité et charité
Delphine Allaire - Envoyée spéciale à Budapest, Hongrie
Place des roses, église Sainte-Elisabeth de Hongrie, Budapest. La fille du roi André montre de part et d’autres des statues, vitraux et autels, son visage de tendresse et miséricorde. «Elle veille sur nous», murmure Katà, robe couverte de roses rouges, l’une des tsiganes ayant ému le Pape. Des danses et musiques rhapsodiques, violons, chants roms, Anima christi de Frisina ont baigné l’église accueillant pour la première fois un successeur de Pierre. Katà et son groupe ont chanté et dansé les larmes aux yeux devant lui, montrant la brûlante piété populaire chère au Pape argentin. «Le moment certainement le plus profond et vrai de cette matinée», relève Mgr Janos Szekely, évêque de Szombathely et responsable de la pastorale des réfugiés de l’épiscopat hongrois.
L’héritage de sainte Elisabeth de Hongrie, patronne de la charité, a revêtu plusieurs visages ce samedi matin: ukrainien, gréco-catholique hongrois pakistanais, afghan, irakien, iranien, et soudanais du sud pour les origines présentes. Quatre témoins se sont exprimés devant une assemblée intergénérationnelle et composite de près de 2 000 personnes: une mère de famille gréco-catholique hongroise remerciant la charité de son Église pour l’avoir soulagée dans sa misère financière, un père de famille ukrainien ayant fui les bombes de Dnipro en mai dernier, ou encore un diacre hongrois et son épouse prodiguant des soins aux sans-abris du pays.
Comment avez-vous vécu cette rencontre avec le Pape ce matin?
Paul VI disait que les pauvres n’étaient pas la périphérie de l’Église, mais son cœur. Cette rencontre va aider la Hongrie pour que notre mentalité de défendre la vérité, quelquefois un peu rigide, soit conjuguée avec la tendresse et la bonté. Le Pape nous a rappelés que le langage de l’Église est celui de l’amour, aider les pauvres. Tous ceux qui en ont besoin.
La charité, une langue universelle selon le Pape. Avec quels accents l’Église hongroise parle-t-elle cette langue?
Nous avons beaucoup d’initiatives pour les roms, qui constituent 8% de la population hongroise. Des maisons ouvertes où tout le monde peut manger, étudier, faire du sport. Toute la Caritas Hongrie aide chaque famille dans le besoin. Avec les nombreux réfugiés ukrainiens arrivés depuis l’année dernière, l’Église a cherché par tous les moyens d’ouvrir les foyers et les écoles de nos églises (les écoles catholiques sont gratuites dans le pays, ndlr).
Quelle est la contribution spirituelle des roms à l’Église hongroise?
Les tsiganes ont un amour très fort pour la famille et les enfants. Ils ont un sens profond de la foi et font l’expérience permanente de la joie et de la fête. Ils peuvent aider notre culture et nous enrichir. Ce matin, on a pu toucher cette valeur de la culture gitane. Ce n’est absolument pas un problème, mais un enrichissement total pour la Hongrie.
Quelles traces en termes d’accueil des réfugiés les discours du Pape laisseront en Hongrie?
Le message du Pape est accueilli à cœur ouvert par beaucoup de Hongrois. Nous avons compris que la lutte pour survivre, et ne pas disparaitre de l’Histoire qui est une caractéristique de notre nation, ce fort désir de résistance, doit être conjugué avec l’amour chrétien et la tendresse. Vérité et miséricorde. Garder la vérité de la famille, de notre langue maternelle qui est très spéciale et unique au monde, notre histoire difficile faite de luttes et de tragique, nous devons l’allier à la charité.
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