Ukraine: pour le nonce en Hongrie, «le dialogue apporte l’espérance»
Entretien réalisé par Delphine Allaire - Cité du Vatican
Le premier nonce installé de façon stable à Budapest le fut en 1920, année de l’ouverture d’une ambassade hongroise près le Saint-Siège à Rome. Les liens ont été rompus en avril 1945, lorsque le nonce Mgr Angelo Rotta a dû quitter Budapest. Entre 1944 et 1945, le diplomate milanais a solennellement protesté en tant que doyen du corps diplomatique, contre la déportation des Juifs. Il a ensuite été reconnu Juste parmi les nations.
La Hongrie et le Saint-Siège ont ensuite rétabli leurs relations diplomatiques officielles le 9 février 1990. La Hongrie est devenue le deuxième pays du Pacte de Varsovie (après la Pologne le 17 juillet 1989) à rétablir des relations bilatérales avec le Vatican, même si le dialogue était maintenu pendant la Guerre froide. En 2001, les Musées du Vatican ont accueilli une exposition consacrée au millénaire de la chrétienté hongroise, Hungariae Christianae Millennium.
Mgr Banach, précédemment en fonctions en Afrique de l’Ouest lusophone et francophone, a été, lui, nommé par le Pape en Hongrie le 3 mai 2022. À la veille de cette quatrième visite d'un Souverain pontife dans l'histoire de la Hongrie, Mgr Banach souligne aussi l’âme chrétienne de l’Europe et l’importance accordée à la culture en terre magyare.
À quand remontent les relations entre la Hongrie et le Saint-Siège?
Les liens commencent avec la conversion d'Étienne, premier roi de Hongrie et saint patron du pays. Il a embrassé le christianisme et a été la première personne qui a consacré un royaume à la Vierge Marie. Depuis ce moment, il y a eu beaucoup de contacts avec Rome. Le premier document juridique de Hongrie parle du respect de l’autre, de la liberté religieuse. Le christianisme est une expérience enracinée dans les cœurs et les esprits des Hongrois. Plus récemment, les deux voyages de saint Jean-Paul II en 1991 et en 1996 ont renforcé ces liens; il en sera de même avec la visite de François.
Je ressens une certaine émotion personnelle, en tant que nonce apostolique, à recevoir le Saint-Père ici à Budapest. Je n’étais pas encore en Hongrie lors de sa première venue pour le 52e congrès eucharistique international.
Quels sont les points de convergence aujourd’hui entre le Saint-Siège et l’État hongrois?
Il y a beaucoup d’éléments communs. Je citerai en premier l’importance de la reconnaissance du christianisme dans l’histoire de l’Europe et la création d’une mentalité européenne. Il faut reconnaitre que l’État hongrois est très généreux du point de vue financier avec les chrétiens persécutés dans le monde. L’importance aussi de la culture comme véhicule de transmission des valeurs pour expliquer l’histoire. L’importance d’un dialogue interreligieux. Arrivé en juillet dernier, j’ai été très impressionné par la haute qualité de ce dialogue entre les confessions -entre Églises chrétiennes, avec les juifs et les musulmans-.
Vous avez été nommé à Budapest quelques mois après le déclenchement de la guerre en Ukraine. Comment ce conflit s’invite-t-il dans le paysage hongrois, frontalier de l’Ukraine?
Tout le monde, Hongrie incluse, recherche la paix. Ce sont des choses qui sont en arrière-plan de la visite du Pape. La Hongrie a accepté beaucoup de réfugiés ukrainiens. La réponse de charité de la part des instances catholiques et autres Églises, mais aussi de l’État hongrois, est une chose merveilleuse. Je pense que le Pape va reconnaître cette contribution en faveur des réfugiés ukrainiens au cours de sa visite.
Comment caractérisez-vous la diplomatie vaticane dans cette guerre entre chrétiens en sol européen?
La diplomatie en général est toujours en faveur du dialogue. C’est une caractéristique centrale de la diplomatie du Saint-Siège. Nous cherchons à promouvoir le dialogue entre les parties, car le dialogue apporte toujours l’espérance. Nous ne devons jamais abandonner l’espérance du dialogue qui pourrait contribuer à arriver à une paix définitive.
Votre prédécesseur à Budapest était aussi d’origine américaine. Quel est le lien particulier de votre pays natal avec la Hongrie?
Que je sois aussi américain est, je pense, accidentel. Mais la question est très importante, car il y a de grands liens entre les États-Unis d’Amérique et la Hongrie. En 1956, le cardinal József Mindszenty (1892-1975) s’est réfugié dans l’ambassade américaine de Budapest. Il y est resté quinze ans. L’ambassade des États-Unis a offert son hospitalité et a décidé de prendre le cardinal Mindszenty. C’est un grand geste d’humanité, d’espérance et de réconciliation historique qui manifeste l’importance des relations entre les deux pays.
Comment considérez-vous la Hongrie dans le concert actuel des nations européennes?
Amateur de musique classique, j’aime beaucoup cette image de concert des nations. Dans un concert d’orchestre, il y a différentes parties: les violons, les pianos, les autres instruments. Tous sont tenus de sonner selon leurs capacités, mais l’ensemble d’entre eux produit un son incroyable. Chaque nation peut contribuer positivement et les autres nations sont tenues d’écouter ce que les autres musiciens ont à dire et à partager.
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