Cameroun: l'attente d'une présence chrétienne «plus agissante» dans la société
Entretien réalisé par Adélaïde Patrignani – Cité du Vatican
Le Cameroun, un pays en proie à une crise humanitaire et politique dans plusieurs régions. Tandis que des exactions sont commises par les islamistes de Boko Haram dans l’extrême-nord du pays, des groupes séparatistes anglophones sévissent au nord-ouest et au sud-ouest. Ces tensions ont provoqué des déplacements massifs de population, mais aussi beaucoup de violences: incendies de villages, attaques d’hôpitaux, meurtres et enlèvements. De nombreuses écoles ont aussi dû fermer... 174 établissements scolaires ont été pris pour cible entre 2016 et 2019.
Un processus de réconciliation nationale à l’arrêt
Sur le plan religieux, le Cameroun est un pays à majorité chrétienne. Environ 65% des 25 millions d’habitants sont chrétiens, et 38% catholiques. Même si elle doit faire face au défi des sectes, l’Église est encore très vivante. C’est ce dont témoigne le prêtre espagnol Angel de la Victoria, des missionnaires xavériens, une congrégation qui fête cette année les 125 ans de sa fondation. Il est venu pour la première fois au Cameroun en 1989, avant d’aller servir une dizaine d’années au Tchad, et aussi en Espagne. Il est revenu au Cameroun en 2013. Actuellement en mission à Yaoundé, la capitale, le père Angel est témoin des défis que traverse le pays. Le chômage des jeunes est à ses yeux l’un des plus préoccupants. «Nous avons beaucoup de jeunes bien préparés, car il faut dire que le Cameroun a investi sur l’éducation». Des doctorants au chômage ont ainsi manifesté avant Noël pour faire part de leur malaise.
Le prêtre «ne voit pas trop les conséquences» du grand dialogue national qui s’est déroulé début octobre. Le président Paul Biya l’avait convoqué dans l’espoir de mettre fin au conflit séparatiste qui ensanglante les deux régions anglophones dans l'ouest du pays. Mais les violences continuent, constate le père Angel. Le missionnaire souligne l’importance de revisiter une histoire douloureuse, afin de mieux construire l’avenir.
Vivre sa foi avec plus de cohérence
«Je ne me sens pas dans l’insécurité», explique-t-il également. Il pointe cependant la «corruption généralisée», «une justice parfois arbitraire», et le «fléau de la consommation de la boisson». «Malgré cela, l’envie, la force pour lutter, l’espérance ne manquent pas», assure le missionnaire espagnol.
Son espoir est «que les chrétiens puissent se faire entendre», et qu’ils fassent «sentir leur présence dans tous les domaines de la société». Il remarque un fossé «entre nos églises pleines à craquer à chaque fois, et la présence active des chrétiens dans toutes les dimensions de leur vie». «On se demande où sont ces chrétiens qui remplissent les églises», poursuit le père Angel, qui attend que «la présence chrétienne dans tous les domaines de la société» soit «plus agissante». Afin de témoigner que «la foi interpelle la vie».
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