À Lourdes, un Britannique est pour la première fois reconnu miraculé
Delphine Allaire – Cité du Vatican
Le monde avait les yeux rivés sur la réouverture de Notre-Dame de Paris quand l’annonce d’un nouveau miracle reconnu au sanctuaire de Lourdes en 1923 est arrivée de Liverpool, au nord de l’Angleterre, dimanche 8 décembre. L’archevêque de la cité portuaire a reconnu dans un communiqué «un processus de prodigieuse guérison absolument en dehors et au-dessus des forces de la nature». «Compte tenu du poids des preuves médicales, du témoignage de la foi de John Traynor (1883–1943) et de sa dévotion à Notre Dame, c'est avec une grande joie que je déclare que la guérison de John Traynor, atteint de maladies multiples, est effective», a-t-il ajouté, reliant la reconnaissance lourdaise à «un signe d’espérance» au seuil de l’Année jubilaire 2025. Ainsi le diocèse de Liverpool, également ville natale du Secrétaire du Saint-Siège pour les Relations avec les États, Mgr Paul Richard Gallagher, célébrera le miracle dans sa cathédrale en février prochain.
Une foi simple, pleine d'espérance
À Lourdes, la reconnaissance post-mortem a aussi été proclamée dimanche. C'est pourtant il y a près d'un siècle que la guérison fut constatée et effective. Elle est parue dès 1926 dans le Journal de la Grotte, organe officiel du sanctuaire, mais n’avait pas été envoyée à l’époque à Liverpool. En 2023, année centenaire du premier pèlerinage de Liverpool à Lourdes, les équipes du bureau des constatations médicales ont rouvert le dossier. Par deux fois dans le passé, l’Église liverpuldienne avait tenté de faire reconnaitre la guérison, mais la documentation médicale manquait. Mgr Jean-Marc Micas, évêque de Tarbes et Lourdes, a transmis les documents cet été et la commission canonique a pu se réunir le 29 novembre dernier. La reconnaissance post-mortem a ainsi pu être proclamée ce dimanche, réjouissant le président du bureau des constatations médicales du sanctuaire: «Le travail patient des médecins de Lourdes et du bureau des constatations offre beaucoup de joie», commente Alessandro de Franciscis. C'est la première fois qu'un évêque d'un diocèse de langue anglaise arrive à la formulation d'un décret de guérison miraculeuse. Les 70 autres miraculés sont en majorité français, un petit noyau de huit Italiens, trois Belges, un Autrichien et un Suisse.
«La procédure autour de John Traynor est unique, car habituellement l’évêque reconnait une personne vivante. Il n’y aura pas d’autres cas de ce type», ajoute le médecin napolitain dirigeant le bureau médical de Lourdes depuis 2009. Selon le docteur De Franciscis, John Traynor a toujours été considéré miraculé: «C’était un homme de foi malgré ses souffrances, son handicap sévère, il venait à Lourdes, sanctuaire dans lequel il avait foi. Cela nous enseigne l’importance de l'espérance. C’était aussi un homme simple, sachant à peine lire et écrire, devenu figure de référence, car il a servi les pauvres et s'est placé aux côtés des malades.»
De la Royal Navy aux piscines de Lourdes
Né à Liverpool en 1883, d'une mère immigrée irlandaise, John Traynor s’engage dans la Royal Navy au début de la Première guerre mondiale. D’abord blessé le 8 octobre 1914 près d’Anvers (Belgique), il est frappé par des tirs de mitrailleuse le 8 mai 1915 au cours de la bataille de Gallipoli (actuelle Turquie). De nombreuses opérations médicales échouent. Il perd l’usage de son bras droit, mais refuse l’amputation, et souffre de fortes crises épileptiques. En 1920, un chirurgien de Liverpool tente de guérir l’épilepsie par trépanation, entrainant la paralysie partielle des deux jambes. Son état est tel, qu’au début de l’été 1923, «il est désigné pour l’hospice des incurables où il doit entrer le 24 juillet 1923» (procès verbal de guérison du Bureau des Constatations Médicales, signé par le président, docteur Auguste Vallet, 2 octobre 1926). Au mois de juillet 1923, il se rend à Lourdes à l’occasion du premier pèlerinage du diocese de Liverpool au Sanctuaire. Il guérit, le 25 juillet, après avoir été immergé aux piscines du sanctuaire puis avoir participé à la procession eucharistique et bénédiction des malades. Le même jour, les médecins accompagnant le pèlerinage constatent son état. Il quitte Lourdes le lendemain. Il se rendra au Bureau des Constatations Médicales le 7 juillet 1926 pour déclarer sa guérison.
John Traynor revient ensuite chaque année à Lourdes comme brancardier, jusqu’en 1939. Il est membre de l’Hospitalité «Liverpool Brancardier Association». Il est dit au Royaume-Uni qu’il est le premier catholique britannique a être guéri à Lourdes. Il meurt le 8 décembre 1943 d’une toute autre maladie. «Toutes les guérisons sont importantes, même celles qui ne sont pas déclarées, celles qui ne sont pas miraculeuses. Il s'agit en tout cas d'une très belle histoire de guérison», conclut le président du bureau des constatations médicales. Le dernier miracle reconnu à Lourdes remonte à la religieuse française sœur Bernadette Moriau, le 11 février 2018.
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