Mgr Roger Houngbédji: s'engager en politique, c’est s’engager à servir la charité envers tous
Juste Hlannon-Cotonou
C’est devenu une tradition au Bénin de célébrer à la Saint-Sylvestre, veille de la Journée mondiale de la paix, une messe solennelle de prière pour la paix, avec une participation massive des cadres et personnalités politiques du pays. Ce 31 décembre n’en a pas fait exception: une foule de fidèles, responsables et personnalités politiques a été en communion avec Mgr Roger Houngbédji dans l’église paroissiale Saint-Michel de Cotonou, archicomble pour la circonstance.
2025, une année délicate pour les béninois
Dès l’exorde de son homélie, l’archevêque de Cotonou a rappelé le contexte particulier de cette fin d’année dans leur pays: «cette année 2025 est particulièrement délicate pour nous car c’est elle qui devra nous préparer immédiatement à 2026 où, pour la première fois, notre pays va organiser des élections générales». Le contexte semble d’autant plus délicat que ces élections se tiendront sur la base de «nouvelles dispositions légales au sujet desquelles toutes les inquiétudes ne sont pas encore totalement dissipées», a affirmé celui qui est aussi le président de la Conférence épiscopale du Bénin .
À moins de deux ans des élections générales prévues pour avril 2026, le code électoral actualisé en 2019 puis en 2024 continue de cristalliser des tensions, l’opposition continuant d’en solliciter en vain la relecture. «Ce code électoral est crisogène et capable de discréditer le pays» tonnait, le 10 novembre 2024, Éric Houndété, chef de file de l’opposition béninoise. «Face à ces défis, à quoi la foi et l’espérance chrétiennes nous engagent-elles?», s’interroge Mgr Houngbédji.
Avoir Dieu comme repère, le critère ultime de tous nos choix
La suite de l’exhortation s’est construite sur trois vœux, «trois chantiers» selon l'archevêque: la conversion sincère à Dieu, l’engagement à vivre une charité sincère envers tous et l’option préférentielle pour la vérité. «Nous convertir à Dieu, c’est-à-dire nous tourner davantage vers Lui, le considérer comme le repère, l’unique nécessaire, le critère ultime de tous nos choix», a recommandé Mgr Houngbédji aux dirigeants béninois. Et pour cause, «les tentations et les risques de l’ivresse du pouvoir et de l’avoir sont tellement forts qu’il est nécessaire pour toute personne engagée en politique ou appelée à exercer quelque responsabilité, de tourner constamment et radicalement son cœur vers Dieu».
Par ailleurs, à propos de l’engagement politique, l’archevêque de Cotonou a estimé que cet engagement devrait s’ancrer dans la charité. «S’engager en politique, c’est fondamentalement s’engager à servir la charité envers tous», a dit le prélat. «Toute autre manière de faire la politique, qui exclut la charité envers tous, dénature et défigure l’action politique», a-t-il affirmé, évoquant, pour conforter son propos, le Pape François qui affirmait en 2017 que «la politique est avant tout service; elle ne sert pas les ambitions individuelles, les factions dominantes ni les intérêts particuliers».
Le peuple que l’on doit diriger est l’unique détenteur de la souveraineté
Une autre accroche de l’homélie de l'archevêque a été son appel à la redevabilité et l’honnêteté dans la gouvernace. «Ne jamais oublier que ce peuple que l’on doit diriger est l’unique détenteur de la souveraineté», a rappelé Mgr Roger Houngbédji aux politiques béninois, fustigeant «le recours au mensonge et aux fausses promesses pour séduire le peuple».
À noter aussi qu’à la fin de la célébration eucharistique, le père Éric Okpeitcha, secrétaire général adjoint de la Conférence épiscopale du Bénin, a présenté au public la lettre pastorale «Peuple béninois, souviens-toi et relève ton pays!» publiée en 1990 et rééditée par l’aumônerie nationale des cadres et personnalités politiques, en prélude au colloque qu’elle tient au mois de février prochain. Ce sera à l’occasion du 35e anniversaire de la Conférence nationale de 1990, qui avait marqué le passage du pays à l’ère démocratique.
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