Le Saint-Siège alerte sur l’autonomisation des systèmes d’armes nucléaires
Jean-Benoît Harel – Cité du Vatican
«Le Saint-Siège est profondément préoccupé par la menace existentielle que la prolifération nucléaire et les armes nucléaires continuent de poser». Mgr Ettore Balestrero a rappelé très clairement la ligne de l’Église catholique sur la question des armes nucléaires lors des premières discussions du deuxième comité préparatoire pour la conférence de révision du Traité de non-prolifération des armes nucléaires (TNP), qui se tiendra en 2026.
Depuis le 22 juillet et jusqu’au 2 août, ce comité se tient à Genève, avec pour objectif de trouver un accord sur un projet de texte pour une éventuelle modification du traité ouvert à la signature à partir de 1968, entré en vigueur en 1970 et qui compte 191 États parties, dont les cinq États dotés d'armes nucléaires.
L'immoralité de la possession d'armes nucléaires
Au cours des premiers débats, l’Observateur permanent du Saint-Siège auprès des institutions internationales basées à Genève, Mgr Ettore Balestrero a rappelé la parole du Pape François sur «l'immoralité de la fabrication et de la possession d'armes nucléaires».
Alertant sur les hausses des dépenses militaires liées aux armes nucléaires, le nonce les a dénoncées comme «un affront à l’humanité» au regard des lourdes pertes que pourrait engendrer un conflit nucléaire. Alors que plusieurs puissances nucléaires sont en conflit ouvert comme Israël ou la Russie, l’Observateur permanent a au contraire estimé que «la recherche du dialogue doit être incessante».
Un risque d'escalade plus élevé dû aux systèmes d'armes autonomes
Proposant trois pistes de réflexion, Mgr Ettore Balestrero a rappelé combien le désarmement et la non-prolifération des armes nucléaires témoignent d'une «responsabilité éthique envers tous les membres de la famille humaine». Lors de sa visite à Nagasaki en novembre 2019, le Pape François avait déjà évoqué l’indispensable «éthique mondiale de solidarité et de coopération au service d'un avenir façonné par l'interdépendance et la responsabilité partagée dans toute la famille humaine d'aujourd'hui et de demain».
Le représentant du Pape à Genève s’est ensuite inquiété de l’expansion et de la modernisation des arsenaux nucléaires. «Les progrès des cybertechnologies ont encore compliqué les risques liés à la possession d'armes nucléaires», a-t-il affirmé, mettant en garde contre les risques d’escalade involontaire en raison de délais de prise de décision accélérés par les composants autonomes. La situation «devient particulièrement préoccupante lorsque des composants autonomes sont intégrés dans les systèmes d'armes nucléaires», a poursuivi Mgr Ettore Balestrero.
Enfin, le nonce a rappelé la proposition du Pape Paul VI dans son encyclique Populorum Progression de 1967, celle d’un fonds mondial alimenté par une partie des dépenses militaires, qui viserait à «éradiquer la faim et à promouvoir le développement dans les pays les plus pauvres». Le financement actuel des armes nucléaires aurait selon lui toute sa place dans ce fonds, souhaité par l’Église catholique depuis presque 50 ans.
Une seule et même famille humaine
En conclusion, le chef de la délégation du Saint-Siège à Genève a réaffirmé la «ferme conviction qu'un monde exempt d'armes nucléaires est à la fois possible et nécessaire». Pour atteindre cet objectif, qui est aussi celui du TNP, «nous devons reprendre conscience que nous sommes membres d'une seule et même famille humaine», a-t-il terminé.
Conclu en 1968, le TNP promeut la réduction du risque de guerre nucléaire et, à terme, dans son élimination complète. Il comprend des engagements de trois types: de non-prolifération nucléaire, de coopération entre États, et de désarmement.
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