À Madagascar, le cardinal Ambongo encourage les évêques et parle du SCEAM
Stanislas Kambashi, SJ – Cité du Vatican
Le président du SCEAM a tout d’abord exprimé son admiration pour les évêques de Madagascar pour leur dynamisme et leur engagement à évangéliser la Grande Ile, caractérisée par «sa beauté naturelle et la richesse de ses cultures». Il s’est réjoui du fait que l'Église soit bien vivante et en pleine croissance dans ce pays, adressant ainsi ses chaleureuses félicitations aux prêtres, religieux et religieuses, aux catéchistes, aux laïcs engagés dans la pastorale ainsi qu’à tous les fidèles. Le cardinal Ambongo a aussi exprimé ses remerciements à la Conférence épiscopale de Madagascar (CEM) pour avoir offert l’abbé Jean Germain Rajoelison au service de l'Église d'Afrique et des îles en tant que second secrétaire général adjoint et coordinateur de la commission Justice, Paix et Développement au Secrétariat du SCEAM, dont le siège se trouve à Accra, capitale du Ghana.
L’Évangélisation, une tâche prioritaire et une mission urgente pour l’Église d’Afrique
Le président du SCEAM a ensuite abordé le premier point de son discours, portant sur l’évangélisation et l’inculturation, en commençant par évoquer le Document final de la deuxième session du Synode sur la synodalité qui rappelle que «l'Église existe pour témoigner au monde de l'événement décisif de l'histoire: la résurrection de Jésus. Le Christ ressuscité apporte la paix au monde et nous donne le don de son Esprit et nous envoie en mission pour faire de tous les hommes ses disciples». Il a rendu grâce pour la croissance record de l’Église en Afrique et dans ses îles. Les statistiques montrent que «les chrétiens représentent 30 % de la population africaine (18% de catholiques et 12% appartenant à d'autres dénominations chrétiennes)». Malgré cette augmentation, «l'Afrique et ses îles continuent d'avoir faim et soif de Jésus et de l'Évangile», a-t-il déclaré, soulignant que l’évangélisation reste une tâche prioritaire et une mission urgente pour l’Église d’Afrique, comme le dit le Document de Kampala, issu des délibérations et des réflexions des évêques d'Afrique et des îles. C’est à partir de cette annonce que les pasteurs d’Afrique peuvent donner une réponse à la quête du sens et à l’aspiration à une vie meilleure de leurs concitoyens, estime le président du SCEAM.
L’inculturation de l’Évangile dans la richesse des cultures et traditions malgaches
Le cardinal Ambongo a souligné l’importance de présenter le message de l’Évangile «de façon à ce qu’il puisse résonner avec les contextes culturels de nos peuples». D’où le fait de devoir tenir compte de l’inculturation. Madagascar, terre de riches traditions et diverses cultures, est un lieu propice pour embrasser cette diversité tout en restant enraciné dans les principes fondamentaux de la foi chrétienne. Le prélat invite ainsi l’Église malgache à intégrer certains aspects des cultures locales aux enseignements de l’Église, afin de créer «une expression vibrante de la foi qui touche le cœur de notre peuple, comme le recommande le Document final de la deuxième session». Un tel effort d’évangélisation ne peut aller sans une attention aux questions sociales urgentes dont est confronté le pays comme «les défis de la pauvreté, de l'éducation, des soins de santé et de la durabilité». À cela s’ajoutent l’engagement en faveur de la justice sociale et la défense des personnes marginalisées et des sans voix, afin de parvenir à une société plus équitable et plus compatissante.
Dans cette annonce de l’Évangile inculturé, les évêques ne peuvent s’appuyer que sur les prêtres qui sont leurs plus proches collaborateurs. L’archevêque de Kinshasa en appelle à la responsabilité de ses confrères pour le soutien qu’ils sont appelés à apporter aux prêtres dans leurs difficultés, en étant à la fois «un père et guide exigeant». Il exhorte particulièrement à investir dans leur formation en en faisant une priorité, et à développer des cadres de formation permanente, pour une évangélisation de qualité.
La formation permanente des jeunes et des laïcs
Le président du SCEAM s’est aussi penché sur la formation des jeunes et des laïcs en général. Aujourd’hui, a-t-il constaté, plus de 50% de la population malgache est constituée de jeunes, qui sont l’avenir de l’Église et de la société. Ils ont besoin de mentorat et d’un accompagnement sage pouvant les aider à naviguer dans les complexités du monde d’aujourd’hui. Cela étant, les évêques sont appelés à «organiser des programmes de formation pastorale et spirituelle qui permettent à nos jeunes de devenir des témoins actifs de la foi». Il s’agit, par exemple, de leur offrir des opportunités dans les domaines de la communication et de l'approfondissement du message chrétien et de l’éthique sociale chrétienne, afin qu’ils soient aptes à «devenir des leaders qui porteront le flambeau de l'Évangile dans l'avenir». Faisant de nouveau référence au Document de Kampala, le cardinal Ambongo souligne la nécessité de «garantir une formation complète et permanente» aux laïcs, pour que, vivant selon les valeurs de l’Évangile et fières de leur identité chrétienne, ils puissent résister «à la tentation de la prospérité prônée par les églises évangéliques». Ils pourront ainsi briller «à travers leur engagement au service des pauvres, l’accomplissement des obligations envers l'État», les actions en faveur du développement, «et le refus d’adopter des pratiques contraires à l’éthique, telles que la corruption et l’acquisition illicite de richesses».
La synodalité rime avec les pratiques traditionnelles de l'Église en Afrique
Membre du Conseil des neuf cardinaux (C9) chargés de conseiller le Pape pour la réforme de la Curie romaine, le prélat congolais souligne que sa visite a lieu en un moment très particulier car l’Église ouvre une nouvelle ère avec le Synode sur la synodalité et se projette vers le jubilé, l’Année Sainte 2025. Il souligne que sa visite à Madagascar est pour raviver la communion et la collaboration auxquelles appellent la synodalité et le sentiment d'appartenance envers l’institution continentale qu’est le SCEAM. Le renouveau synodal, a-t-il déclaré, appelle à la conversion personnelle, communautaire et pastorale ainsi qu'à une réforme structurelle et invite à l’écoute mutuelle, à marcher, travailler et vivre ensemble, dans l'unité profonde de la koinonia. La synodalité, a-t-il constaté, s’aligne sur les pratiques traditionnelles de l'Église en Afrique, car «enracinée dans les principes anthropologiques africains et malgaches tels que le Fihavanana, le Palaver, l'Ubuntu et l'Ujamaa, qui mettent l'accent sur l'esprit de communauté, la famille, le travail d'équipe, la solidarité et l'unité. L'Église en Afrique a grandi en tant que Famille de Dieu et cette croissance est enrichie par l'expérience des Petites Communautés Chrétiennes, qui a commencé dans les années 1970». Ces communautés ecclésiales de base (CEB), a-t-il fait remarquer, «sont devenues une manière africaine et malgache de contextualiser l'ecclésiologie de communion de Vatican II».
Autour de la création du SCEAM
En parlant de la vie en communion et du modèle ecclésiologique de l'Église en tant que Famille de Dieu, adopté par les pères synodaux du premier Synode spécial sur l'Afrique en 1994, le cardinal Ambongo souligne que c’est dans cet esprit que «le Symposium des conférences épiscopales d'Afrique et de Madagascar (SCEAM) a été créé en juillet 1969 à Gaba, en Ouganda». Le mot «Symposium» a été choisi, au lieu de «conférence», pour insister sur ce désir de communion et de fraternité, pour le bien commun de l'Afrique, ajoute-t-il. «Le SCEAM a donc été créé avec la mission précise de préserver, d'encourager la communion, participation et la collaboration entre les Conférences épiscopales nationales d'Afrique et de ses îles». Suivant l’esprit des pères fondateurs, cette instance continentale promeut une vision pastorale commune qui aborde les problèmes et les défis partagés de l'Afrique et de ses îles, a précisé son président.
Parlant de l’importance du SCEAM et de ses visites comme son président, l’archevêque de Kinshasa a évoqué les paroles du Pape Benoît XVI dans Africae Munus, qui souligne l’importance pour les évêques africains de contribuer à soutenir, de manière efficace et effective, cette structure continentale de solidarité et de communion ecclésiale. Il a félicité et remercié l’Église de Madagascar pour son exemple, car elle paye toujours ses cotisations annuelles. L'Afrique et ses îles ne peuvent être l'Église de demain sans le SCEAM. Cette structure sert de plate-forme de collaboration et d’échange, et favorise l'unité entre les nombreuses conférences épiscopales de notre continent, a-t-il déclaré, soulignant encore une fois l’importance de soutenir cette institution et à travailler à la réalisation des objectifs communs, pour porter un message fort et un impact amplifié. L’archevêque a aussi évoqué le lien intrinsèque entre le SCEAM et les conférences épiscopales régionales et nationales.
Des réformes au sein du SCEAM
Nous sommes à une époque «où le mot d'ordre est la réforme et le renouveau afin de répondre de manière adéquate à la mission que nous sommes appelés à remplir en tant qu'Église», a constaté le cardinal Ambongo. À 55 ans, le SCEAM est aussi appelé à entrer dans cette optique. L'une des réformes que cette institution continentale souhaite mettre en œuvre concerne les représentants des régions au sein du comité permanent du SCEAM et la durée de leur mandat, pour des prises décisions qui s’imposent. La structure propose que le représentant de la région au sein du comité permanent du SCEAM soit le président de la région, qui peut être remplacé par le vice-président de la région en cas d'empêchement. Conformément aux statuts du SCEAM, la durée du mandat des membres est de trois ans et ils ne peuvent être réélus que pour un seul autre mandat consécutif, a précisé le prélat, en remerciant les évêques malgaches pour leur accueil et hospitalité empreinte de fihavanana que l’Église malgache a célébré et vécu durant le congrès eucharistique à Antsiranana.
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